Tuesday, March 23, 2010

Dora et sa jeune maîtresse



Photos by me

Malgré que ces photos datent de quelques semaines, j'ai été loin d'en oublier les sujets.

J'ai rencontré bébé chat Dora et sa jeune maîtresse alors que je marchais en direction du bureau de poste. Un éclat de rire, un gobelet tendu en quête de quelques sous et un chaton un peu malmené, la petite fille et sa grand-mère mendiaient entre un McDonald's et un kiosque à revues. Je leur ai donné une pièce, puis j'ai demandé si Dora voudrait bien poser pour moi. Sa maîtresse a accepté, autant qu'elle pouvait elle-aussi faire partie de la photo. Alors que la petite replaçait avec soin le collier de perles rouges de son chat, sa grand-mère me confia qu'elles étaient arrivées récemment de la Pologne et qu'elles faisaient de leur mieux pour ramener un peu d'argent à la maison. Leur histoire m'a beaucoup touchée et me pince encore le coeur, pour être honnête.

Depuis l'abolition des frontières et de la consécration de la liberté de circulation des ressortissants des 27 États membres faisant partie de l'Union européenne, les sans-papiers en France se font de plus en plus nombreux (et présents). Les citoyens de la nouvelle Europe en situation irrégulière ou plus communément appelés les sans-papiers vivent souvent dans la rue, ou du moins sur un revenu très bas. Ils ne peuvent avoir accès au marché régulier du travail, car pour être qualifié de travailleur migrant au sein de l'UE, il faut justifier d'une assurance-maladie complète ainsi que de ressources financières supérieures au seuil de déclenchement de l'aide sociale dans le pays d'accueil. Il est évident que les parents de la jeune maîtresse de Dora ne peuvent lui offrir de telles conditions de vie.

Il y a eu une manifestation il y a de ça quelques jours près de chez moi en faveur de la reconnaissance de nouveaux droits aux immigrants illégaux. Je dis nouveaux droits puisqu'il y en a déjà d'implémentés, comme celui de l'éligibilité sous certaines conditions à une aide médicale d'État en France. Toutefois, il ne s'agit que de débarquer Place St-Michel pour constater que ce n'est pas assez. Dans mes cours, on me raconte que l'Europe économique des années 1980 se déplace de plus en plus vers une Europe sociale. Je veux bien, mais ce changement entraîne d'importantes conséquences qui, malheureusement, sont souvent négligeables au point de vue politique. Les sans-papiers n'exercent pas un gros lobby au sein du Parlement européen, j'ai entendu dire.

Ce n'est pas que soudainement j'ai envie de faire mon activiste ou ma militante (jamais je n'accepterai d'adopter le look hippie et j'ai déjà vu pire qu'une enfant dans la rue), mais quand j'entends dans mes cours que l'Europe est un modèle sacro-saint d'harmonisation sociale et de respect des droits de l'homme, je pense à la jeune maîtresse de Dora qui, au lieu d'être à l'école à cette heure, est plutôt assise à mendier et je doute un peu.

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